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2020-08-18
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Tags : #TVShowReview
Rédigé : 18-08-2020
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Précédé/Suivi de : [[2020-08-14 The Untamed (TV Show)]]
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# [[SOTUS]] : une série thaï gay
Après avoir terminé ​*The Untamed*​ et passé mon samedi à regarder des vidéos sur le phénomène autour de cette série (le fandom chinois est barge), j’ai changé de pays, tout en restant en Asie.
J’ai regardé dimanche après-midi et hier les deux saisons de la série SOTUS. Une série gay thaï, qui se passe à Bangkok et qui a été diffusée en 2016 et 2017. La première saison est centrée sur le bizutage en entrée d’université, dans une Fac d’ingénierie. On suit Kong qui essaye de naviguer ces différentes activités et qui se fait remarquer par le chef bizuteur Arthit. On comprend assez vite que Kong est tombé amoureux dès le départ... et ce qui suit est assez fascinant : Arthit est autant agacé par Kong qu’il est intrigué. Ils finissent par se mettre ensemble en fin de saison.
Dans SOTUS S, nom de la seconde saison, on les retrouve 3 ans plus tard : Kong est devenu le chef bizuteur, a décidé de rendre les épreuves plus humaines afin que l’enseignement qu’ils veulent dispenser aux bizuts leur soit plus évident. Arthit, pour sa part, est entré dans la vie professionnelle. La première partie de la saison est centrée principalement sur le bizutage et la vie universitaire, tandis que la seconde partie s’intéresse aux expériences d’Arthit et de Kong à Océan Electrics, une entreprise qui fabrique de l’électroménager. Ce qui est le plus troublant, c’est qu’Arthit, après avoir été en couple pendant trois ans avec Kong, est toujours émotionnellement dans le déni, refusant les nombreuses marques d’affection de son petit-ami.
Cet aspect-là de l’intrigue m’a frustré, car ça sonnait assez faux (comment Kong pourrait-il rester trois ans avec ce gars qui le repousse constamment ? Une telle situation serait émotionnellement épuisante - et il y aurait de quoi finir dépressif.)... mais j’ai trouvé ça fascinant, car ça m’a obligé à considérer une relation de couple où l’un des protagonistes souffrirait d’un tel mal (homophobie internalisée, par exemple ; ou être tombé amoureux d’un homme alors qu’on n’est pas gay...).
Et il y a quelque chose d’absolument beau dans cette relation, car il est évident qu’Arthit est celui qui a le plus à perdre dans cette histoire. Il est celui qui est le plus émotionnellement investi, mais comme il est coupé de ses émotions, il ne perçoit pas à quel point son équilibre repose sur Kong. Ce dernier a la patience et la dévotion d’un ange, mais, comme il sait ce qu’il veut, on comprend qu’il est aussi capable de passer à autre chose, si jamais les choses ne vont pas dans la bonne direction.
Tout cela est clairement mis en avant dans l’épilogue-épisode de Noël, d’une compilation intitulée *[[Our Skyy]].* Le cinquième épisode est consacré à ces deux protagonistes : on retrouve Kong et Arthit quelques mois plus tard... Kong a beaucoup bossé pour décrocher une bourse afin d’aller étudier les sciences économiques en Chine (la matière qu’il a toujours voulu étudier). L’épisode commence à la veille des résultats... Et l’objectif de l’épisode est de nous montrer comment leur relation peut survivre à ce genre d’épreuve, qui habituellement sonne le glas de la relation. Être séparé durant deux ans, à cet âge-là ...
Bref, Arthit est convaincu depuis le début que leur relation ne durera pas. Il voit donc dans cette bourse un signe du destin : il est temps de mettre fin à leur relation. J’ai pleuré autant que les protagonistes, je crois, et j’ai regretté pendant les 3/4 de l’épisode d’avoir tenu à regarder cet épisode spécial. Heureusement, la fin positive m’a réconcilié avec cette dernière histoire. Ce fut extrêmement cathartique. Cette dernière épreuve a permis à Arthit d’accepter les sentiments qu’il avait pour Kong, de faire face à l’incertitude et de braver les difficultés, de décider de s’accrocher à leur belle histoire.
Au final, le seul point laissé de côté, et que la saison 2 abordait de très loin, c’est la question de la famille. Il semblerait que la famille de Kong ne sache rien de la vie de leur fils, ce qui est assez incroyable... mais peut-être vraisemblable dans le cadre de la Thaïlande. Est-ce que les couples gays présentent leur partenaire à leurs parents et frères et sœurs, ou est-ce qu’ils vivent leur vie amoureuse dans une bulle, où seuls leurs meilleurs amis et collègues de boulot qui leur sont proches le savent ?
Quant à la famille d’Arthit, on apprend seulement qu’il est fils unique dans la saison 1 et c’est tout.
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# [Publié sur facebook]
Regardé les deux saisons (\+ l’épisode spécial de Noël) de cette série LGBT thaï, pour me remettre des émotions suscitées par The Untamed. Il semble que la Thaïlande nous ait régalés de plusieurs adaptations audiovisuelles de romans MM (boy’s love)... que je vais m’empresser de découvrir, vous vous doutez bien.
Dans cette série, le bizutage est envisagé comme une entreprise d’éducation (sans pour autant nier qu’il peut être une simple violence arbitraire) : les aînés facilitent l’intégration des bizuts et leur permettent d’acquérir les compétences sociales et l’éthique de travail nécessaires pour réussir les études (et la vie professionnelle). Afin de dépeindre ce bizutage avec plus de finesse, on est amené à voir les doutes, les colères et les peurs des bizuteurs.
Évidemment, c’est l’histoire d’amour un peu spéciale entre Kong (à gauche) et Arthit (à droite) qui est le sujet principal de cette série. Kong est bien dans ses bottes, il sait ce qu’il veut obtenir de la vie. Arthit, pour sa part, est déconnecté de ses émotions et sera incapable, dans la saison 2, de PDA (​*public display of affection*​ - et dans le cas présent, *private display* aussi).
Cette série m’a donné envie d’explorer dans ma fiction cette tension, que j’ai trouvée chez Arthit : l’amour que l’on refuse de reconnaître, soit parce qu’on aime un homme alors qu’on est attiré habituellement par les femmes, soit parce que l’intensité de ce que l’on ressent est à ce point effrayant qu’il est plus facile de le nier. (Difficile de savoir où se situe Arthit)
Au final, ce que je trouve le plus fascinant dans ces séries, c’est évidemment de découvrir un espace mental différent, les gestes de l’amour (comment aime-t-on quelqu’un ? Comment le prouve-t-on ?) spécifiques à cette culture.
Bref, de voir comment la question homosexuelle est abordée et, le temps de quelques épisodes, de faire l’expérience, autant que faire se peut, d’être gay dans un autre pays.
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