# Pourquoi j'ai fait le choix de l'autoédition
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#Autoédition #Selfpublishing
Rédigé : 4 octobre 2019
Publié sur mon [site internet](https://fr.enzodaumier.com/edition-autoedition/pourquoi-jai-fait-le-choix-de-lautoedition/).
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En novembre 2016, j’ai autopublié mon premier roman. Il s’agissait des *Frimas d’Oxford*, le tome 2 de ma trilogie *Tendres Baisers d’Oxford*. Ces trois dernières années, j’ai publié trois autres romans en indépendant, ainsi que deux nouvelles. Il était temps de faire un petit bilan sur mes raisons…
## De l’édition traditionnelle à l’autoédition
Mon premier roman, *Tendres baisers d’Oxford*, a été publié en avril 2016 chez HQN, une collection primo-numérique de HarperCollins France (à l’époque Harlequin France). Son succès commercial n’a pas été au rendez-vous (à peine plus d’un demi-millier d’ebooks), et, même s’il était clair dès le début que ce tome appelait une suite, l’éditeur n’a pas souhaité poursuivre les aventures amoureuses de Lucien.
Je me suis donc tourné vers l’autoédition, non par choix dans un premier temps, mais par respect pour mes lectrices et lecteurs. En effet, il me semblait entièrement inconcevable que je ne puisse pas proposer à la lecture le tome 2 quand le tome 1 avait été rédigé avec une suite en tête et se terminait par un retournement inacceptable pour une conclusion. Comme il m’a fallu un troisième tome pour terminer de manière satisfaisante l’histoire de Lucien et d’Andy, celui-ci aussi a été autopublié.
Je dois préciser que je ne suis pas arrivé dans le milieu de l’autoédition sans expérience éditoriale. Sous mon nom civil, j’avais déjà édité une anthologie de fantasy pour un éditeur assez connu en France ; j’avais été brièvement lecteur chez un éditeur jeunesse parisien et aussi pour un petit éditeur anglais de littérature gay. Par ailleurs, j’avais été coéditeur en chef d’un site internet culturel amateur durant quelques années et avais supervisé le travail d’une quinzaine de chroniqueurs. En parallèle, j’étais devenu correcteur de traductions (de l’anglais vers le français) pour Dreamspinner Press (l’éditeur américain de romances M/M). Je ne mentionne pas les nombreuses lectures de manuscrits d’amis, faites dans le privé. Tout cela m’avait permis de développer des compétences, que j’ai pu réutiliser pour éditer mes propres textes.
## Le choix de l’autoédition
Quand je me suis lancé dans l’écriture des *Chroniques de Dormeveille*, je n’ai même pas envisagé de les proposer à un éditeur. Le format assez court de *Raiden* (168 pages), ainsi qu’une histoire d’amour gay (un texte de niche en somme), auraient été rédhibitoires de toute manière. J’aurais pu trouver un éditeur primo-numérique spécialisé dans la publication de textes gays, mais je ne voyais pas l’intérêt de renoncer à une grande part de mes revenus pour une publication numérique seulement — quelque chose que je pouvais faire de mon côté, comme un grand. Par ailleurs, comme il s’agissait de romans qui se passaient dans l’univers des Arches de Verre, je savais que je pouvais compter sur Clara Vanely pour en être l’éditrice.
## Les avantages de l’autoédition
Ce qui m’a plu immédiatement, c’est cette liberté de publier ce que l’on veut quand on veut, sans avoir à trop se soucier de la viabilité commerciale du projet.
Chez un éditeur traditionnel, il n’est pas rare que le roman soit publié deux ou trois ans après sa rédaction. Il faut être patient, et je ne parle même pas des droits d’auteur qui arrivent jusqu’à six mois après la fin de l’année fiscale écoulée. Dans le cas de *Tendres Baisers*, j’ai reçu mes premiers droits d’auteur (une misère) en octobre 2017 (ils avaient pris du retard, si je me souviens bien). Il est vrai qu’il y avait eu une avance de 150 € hors taxes au moment de la publication (reçue lors du printemps-été 2016).
Dans le cas de l’autoédition, il n’y a aucune avance, évidemment, mais les droits d’auteur sont payés mensuellement, avec un petit différé de deux/trois mois. Par exemple, si vous publiez votre texte en septembre sur KDP/Amazon, vous recevrez votre premier paiement à la fin de novembre.
Même si le second tome de *Tendres Baisers* s’est moins vendu que le tome 1 (jusque-là , ça ne surprendra personne), j’ai gagné bien plus d’argent qu’avec le premier tome publié dans le circuit traditionnel. Comme diraient les Anglais, l’autoédition dans mon cas était un no-brainer (une évidence) sur le plan financier.
Je ne me fais pas d’illusion sur ce que j’écris : mes histoires, mettant en scène des personnages gays, sont considérées comme faisant partie d’une « niche ». Si je souhaitais prétendre à un succès commercial, je prendrais des protagonistes hétéros et reléguerais les personnages LGBT à l’arrière-plan (pour donner un exemple précis, regardez le parcours de l’écrivain britannique autoédité Nick Alexander). On peut s’énerver contre cet état de fait, essayer de faire changer les choses, appeler à davantage de diversité, mais la réalité est ce qu’elle est — nous ne pouvons l’ignorer. L’autoédition m’a permis de raconter les histoires que je souhaitais et de les amener directement aux lecteurs qui partagent mes goûts (ils ont bon goût, cela va sans dire).
Par ailleurs, je n’ai pas à me soucier du format de mes histoires : si je souhaite écrire des nouvelles ou des novellas, je peux facilement les diffuser. Les éditeurs n’aiment pas les recueils de nouvelles ni les formats courts, car la sagesse éditoriale affirme qu’ils sont plus difficiles à vendre. Cela veut dire qu’un auteur est un peu forcé à écrire un roman s’il veut être publié (des autrices comme Mélanie Fazi qui se spécialisent dans la nouvelle sont des exceptions, et non la règle).
## Les inconvénients de l’autoédition
Là encore, il ne faut pas chercher loin pour les trouver. L’autoédition exige de l’auteur et de l’autrice qu’ils fassent tout tous seuls. Évidemment, c’est mieux s’ils savent s’entourer de gens qui ont des compétences complémentaires, mais ce n’est pas toujours le cas — soit par manque de connaissances, soit par manque d’argent si vous voulez faire appel à des professionnels.
Si le travail du texte ne m’angoisse pas, car j’ai une certaine expérience dans le domaine et que j’ai des amis avec un bon œil critique ou une bonne connaissance de la langue française, la création de la couverture me donne toujours des suées froides. J’ai vu beaucoup d’horreurs graphiques ces dernières années, aussi bien du côté français que du côté anglais. C’est pourquoi je fais tout mon possible pour que mes couvertures ne soient pas laides, et si possible soient même plaisantes, mais il est évident que je ne suis pas un professionnel. Mes couvertures pourraient être meilleures (par exemple, elles pourraient mieux refléter le genre dans lequel j’écris).
En ces temps de surabondance, l’autre difficulté est la promotion des textes. Nous ne sommes que des gouttes dans un vaste océan. À moins d’avoir déjà des milliers de gens qui vous suivent sur les réseaux sociaux, l’autoédition vous condamne le plus souvent à l’obscurité. Certains auteurs trouveront naturel et facile de promouvoir leur roman — la plupart, toutefois, n’auront aucune idée de comment s’y prendre. En plus, la promotion est un travail à temps plein. Ce temps que l’on passe à parler de son livre, on ne le passe pas à en écrire un autre. Il faut donc veiller à bien s’organiser, et à ne pas se laisser « bouffer » par certaines tâches promotionnelles.
Il serait facile de croire qu’être publié par un éditeur permet d’éviter l’écueil ci-dessus. Cependant, ce n’est pas le cas. De nos jours, l’éditeur attend de son auteur qu’il fasse une promotion active de son roman. Fini le temps où l’autrice pouvait rester enfermée dans sa chambre et ne parler à aucun lecteur. D’ailleurs, il faut le souligner, la promotion que doit effectuer l’auteur(e) sera parfois la seule promotion que l’ouvrage publié recevra. J’ai vu de nombreux romans ne pas rencontrer leur public, car l’éditeur n’avait fait aucun effort pour le promouvoir. Cela peut surprendre, car cela semble illogique au premier abord, mais c’est la réalité d’une industrie qui est connue pour surproduire (un phénomène qui empire chaque année).
## ĂŠtre un auteur hybride
Même si, dans mon cas, l’autoédition l’emporte haut la main sur l’édition traditionnelle, cela ne veut pas dire que je suis opposé à cette dernière. Au contraire, je pense que de nos jours un auteur doit envisager d’être hybride. Certains de ses projets sont mieux portés seuls, tandis que d’autres méritent d’être créés en collaboration avec un éditeur.
La voie traditionnelle dispose encore de nombreux avantages : par exemple, elle permet d’avoir accès aux structures (librairies, prix littéraires, bourses, etc.) qui sont (pour le moment) fermées à l’autoédition. Si vous avez la chance de tomber sur un éditeur passionné qui croit en vous et qui fera son maximum pour porter votre texte, il serait bien idiot de vouloir rester seuls et de refuser l’aide d’une équipe de professionnels expérimentés.
Dans le futur, si un éditeur souhaite travailler avec moi, je ne refuserai pas par principe. Au contraire, je reste persuadé que les bonnes histoires naissent de ce genre de collaborations, et ce qui m’importe au final, c’est d’écrire les meilleures histoires qui seront lues par le plus grand nombre possible.
Mais pour le moment, je suis très heureux de travailler dans mon coin et d’autopublier mes textes. J’ai des lecteurs à l’esprit très ouvert et à l’enthousiasme renversant. Pour un peu, je pourrais même dire que je suis un auteur comblé.