# Semaine du 16 septembre 2024
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## Lundi 16 septembre
*I Hear the Sunspot* (2024) est un très beau BL japonais, avec de bons acteurs et un bon scĂ©nario, adaptĂ© du manga Ă©ponyme, mais, si on le juge d’après les critères du BL seul, c’est une sĂ©rie dĂ©cevante : les protagonistes s’embrassent une seule fois, hors-champ, et ils ne dĂ©clarent leur amour qu’à la toute fin du dernier Ă©pisode, si bien qu’on ne les voit pas ensemble. Du coup, difficile de ne pas espĂ©rer une saison 2 qui satisferait davantage les amateurices de romance.Â
En somme, en l’état, plutôt qu’un BL, c’est une bromance glorifiée.
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## Mardi 17 septembre
C’est peut-ĂŞtre parce que la CorĂ©e du Sud est un pays conservateur et misogyne que la romance occupe une place importante dans la production artistique nationale.Â
Il faudrait alors voir la romance comme un outil de propagande qui maintient la femme, Ă travers des modèles, des aspirations et des fantasmes stĂ©rĂ©otypĂ©s, dans une dynamique particulière, le plus souvent Ă son dĂ©savantage.Â
Ă€ priori, l’homme semble tirer profit de cette reprĂ©sentation genrĂ©e rĂ©trograde, mais il faudrait ĂŞtre bĂŞte pour croire qu’il n’est pas, lui aussi, victime de la romance et de son imaginaire.Â
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## Mercredi 18 septembre
Outil d’oppression de l’hĂ©tĂ©ronorme, la romance, si elle est subvertie, peut ĂŞtre un outil de libĂ©ration.Â
Le BL offre aux créateurices un espace où l’on peut s’éloigner des clichés romantiques afin d’expérimenter. Entre deux hommes, les dynamiques et les rôles sont radicalement différents ; vouloir reproduire les schémas genrés traditionnels devient vite ridicule.
C’est certainement pour cela que beaucoup de femmes aiment lire du BL et en écrire : l’hétéronorme qui régit leur vie y est moins pressante, leur liberté plus grande.
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## Jeudi 19 septembre
D’un point de vue queer, le BL n’est utile que parce qu’il permet une visibilité plus grande et banalise l’image de deux hommes qui s’embrassent. Il permet de faire avancer les droits de la communauté LGBTQ+ dans certains pays, comme c’est le cas en Thaïlande.
Mais son conformisme sulfureux (!) est étrange : il reflète une image assez déformée de la réalité, le plus souvent aseptisée. On s’y reconnait sans s’y reconnaitre. C’est comme si on lisait une histoire écrite par des hétéros pour des hétéros. *Wait…*
C’est exactement cela : parce que les prĂ©occupations de la romance sont, par dĂ©finition, hĂ©tĂ©rocentrĂ©es (couple, mariage, enfants), il y a peu de place pour les vĂ©ritables interrogations des queers. Évidemment, il y a des couples gays qui souhaitent fonder une famille, mais, en rĂ©alitĂ©, la majoritĂ© ne le fera pas. Quand le couple n’a pas pour but de fonder une famille, sa nature change… et les questions que l’on se pose Ă son sujet diffèrent pareillement.Â
Lorsqu'on se trouve hors de l’hétéronorme (qui est semblable à une grande autoroute sur laquelle on peut aller à toute vitesse sans réfléchir), il faut apprendre à tracer son propre chemin. La douleur de ne pas être comme tout le monde s’accompagne d’une liberté vertigineuse et du devoir de donner sens à son existence.
Si le BL était écrit plus souvent par des queers pour des queers, il offrirait une plus grande diversité dans son approche. J’aime à croire que le genre interrogerait davantage l’amour sous toutes ses formes et ne se contenterait pas, par exemple, de raconter la première rencontre.
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## Vendredi 20 septembre
J’envie ces auteurices qui ne se posent pas de questions et qui Ă©crivent leurs histoires comme si leur vie en dĂ©pendait.Â
Pour ma part, je doute, je me questionne, je tergiverse. Les années peuvent passer sans que j’aie écrit une seule ligne… En ce moment, ma bouée de secours, c’est ce *Journal*. Ça fait un an et demi que je le tiens. (Mon endurance est admirable, n’est-ce pas ? Peut-être que je mérite même une médaille !)
Mes envies débordent du simple cadre du roman : j’ai envie d’écrire des essais, des poèmes, des récits. Je me vois davantage comme écrivain que comme romancier. Ce qui me complique la vie : le champ des possibles est plus vaste et je suis incapable de faire des choix. Ne nous étonnons pas si je procrastine pendant des lustres.
Et puisque je parle de lustre (= une durée de cinq ans), l’année prochaine, cela fera un lustre entier que je n’ai rien publié de nouveau.
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