# Semaine du 02 juin 2025 *Ces entrées appliquent l’orthographe rectifiée. Adieu les petits accents circonflexes ! Pour recevoir gratuitement ma newsletter qui propose une édition mensuelle de ce Journal, c'est par [ici](https://enzodaumier.substack.com).* ## Mercredi 04 juin « L’internet est fait de telle sorte que nous ne consommons que le contenu créé au cours des dernières 24 heures. Nous sommes comme des petits hamsters dans leur roue, scrollant encore et encore pour suivre un flux de contenu qui se déploie à l’infini et va plus vite que nous. À mon avis, c’est une tragédie. Ce n’était pas inévitable. L’internet aurait pu nous faire découvrir les idées les plus importantes de l’humanité. Celles qui ont façonné l’histoire et résisté à l’épreuve du temps. Mais au lieu de cela, il nous enferme dans un “maintenant sans fin”. » (David Perell, cité dans la newsletter d’Eleanor Konik) --- ## Jeudi 05 juin Edmund White est mort mardi, à l’âge de 85 ans. C’était l’un des géants américains de la littérature gay.  De lui, je n’ai lu que *Our Young Man* (2016), un roman que j’avais trouvé assez médiocre si mes souvenirs sont corrects, et un de ses mémoires, *Inside a Pearl : My Years in Paris* (2014). Edmund White est associé à mes années oxoniennes, puisque c’est à Oxford que je le lisais, lui et Alan Hollinghurst et Jonathan Kemp et Michael Cunningham et Armistead Maupin et Nick Alexander…  Tout ça, c’était avant que je ne dénigre la littérature gay réaliste pour la romance MM… --- ## Vendredi 06 juin Au-dessus de l’écran de mon ordinateur, j’ai cette citation de George Soros punaisée au tableau en liège : « *There is no shame in being wrong, only in failing to correct our mistakes.* » (Il n’y a pas de honte à se tromper, mais seulement à ne pas corriger ses erreurs.) Je l’ai découverte en 2018 et elle m’a marqué suffisamment pour que je la note et la mette en pratique, tout d’abord dans un cadre professionnel, puis, plus généralement, dans ma vie.  C’est maintenant l’un des critères que j’utilise pour juger mes collègues : nettoient-ils le bordel qu’ils ont mis ? ou laissent-ils les autres le faire à leur place ? Je pardonne assez facilement à ceux et celles qui commettent des erreurs et le reconnaissent, mais je suis impitoyable envers celleux qui refusent d’admettre qu’iels aient pu se tromper. L’incompétence orgueilleuse n’a pas sa place dans le monde du travail (l’incompétence tout court, si ça ne tenait qu’à moi… mais bon… soyons réalistes…), et, face à ce type de personnes, je cesse aussitôt d’être aimable et coopératif. --- ## Samedi 07 juin Sur les réseaux sociaux, un professeur du Collège de France, homosexuel notoire (il a écrit un livre intitulé « Un savoir gai »), publié dans les pages du Figaro, s’affole à l’idée que la Marche des Fiertés parisienne puisse être un évènement politique.  En effet, l’affiche 2025 de l’Inter-LGBT adopte un langage volontiers communiste : « contre l’internationale réactionnaire, queers de tous les pays unissons-nous » !  Selon lui, il ne faut pas être « de droite ou d’extrême droite » pour être « scandalisé » par un tel message. Depuis ses origines, affirme-t-il, la gay pride aurait été une « manifestation joyeuse » louant l’amour et la sexualité sous toutes ses formes et non pas l’endroit de revendications politiques (!). Précisons que ce professeur est historien de la littérature, habitué à étayer ses propos et à manier tous types de documents historiques au quotidien. Mais il semble qu’en dehors des locaux de la place Marcelin-Berthelot et de la rue d’Ulm, la rigueur intellectuelle s’évapore et il est permis de réécrire l’histoire comme on l’entend. Pas besoin d’aller dans les archives pour dénicher la vérité, il suffit de passer deux minutes sur Wikipédia : « En France, la première marche parisienne, indépendante d’autres défilés, a lieu le 25 juin 1977, à l’appel du MLF et du Groupe de libération homosexuelle — Politique et quotidien. » C’est ce manque de rigueur intellectuelle qui m’ennuie le plus dans cette histoire. Que ce monsieur soit choqué par un message de gauche, c’est son droit, il peut même le clamer haut et fort sur tous les réseaux sociaux, mais il faut arrêter de dire ce type d’âneries : « C’est tout bonnement un détournement politique et un effacement honteux et puritain de l’épopée gaie et lesbienne. »  Il semble que la stratégie favorite des gens « de droite ou d’extrême droite » soit d’accuser le camp opposé de faire ce que l’on fait soi-même éhontément. Peut-être aurait-il été plus honnête ici de se lamenter sur le fait que la communauté LGBTQ+, dans ses instances institutionnelles, exclue les gens d’obédiences politiques plus conservatrices (et n’est pas ce que les Anglais appelleraient une « *broad church* »).  Peut-être aurait-il été intéressant, en tant qu’historien, de s’interroger sur le rôle de ces homos « de droite ou d’extrême droite » dans « l'épopée » des droits homosexuels (si seulement ils ont joué un rôle positif, ce dont on est à même de douter quand on voit les Bardella, les Philippot et les Kasbarian de notre époque…). En lisant le post de ce distingué professeur, certains ont eu des réactions plus épidermiques que la mienne : « ta gueule le cis het ». Aller traiter un homo d'hétéro, voilà qui est délicieusement ironique... --- ## Dimanche 08 juin « L’arbre tordu vit sa vie tandis que l’arbre droit finit en planches. » (Proverbe chinois) --- [[Semaine du 2025-05-26|Semaine précédente]] - [[Semaine du 2025-06-09|Semaine suivante]]