# Semaine du 04 août 2025
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## Mardi 05 août
Dans *The Frontiers of Knowledge* (2021), le philosophe britannique A. C. Grayling se propose de faire le point sur ce que nous savons (et ce que nous ne savons pas !) dans trois domaines qui ont vu de grandes avancées ces dernières décennies : la physique, l’histoire (très) ancienne et l’étude du cerveau et de la conscience. (Ma came.)
Ce qui m’a marquĂ© dans son introduction (Ă dessein, plus gĂ©nĂ©rale que le propos principal de l’ouvrage), et qui m’a mis un peu mal Ă l’aise, je dois l’avouer, c’est que tous les exemples citĂ©s viennent de l’Occident… comme si l’histoire du savoir humain se limitait Ă notre rĂ©gion du monde.Â
Ce n’est pas nĂ©cessairement une introduction qui m’aurait dĂ©rangĂ© il y a quelques annĂ©es. Pour grossir le trait, après un cursus universitaire, on finit par croire que la Civilisation a commencĂ© chez les Grecs (après avoir balbutiĂ© en Égypte et dans le Levant) avant de glisser lentement jusqu’à nous, qui l’avons ensuite exportĂ©e gĂ©nĂ©reusement dans le monde entier (ces barbares crĂ©dules et superstitieux !), grâce aux bienfaits plus que douteux de la colonisation.Â
Mais quand on s’intéresse à se qui se passe dans d’autres régions du monde (comme c’est mon cas avec l’Asie), on prend conscience que l’Occident n’a pas le monopole du savoir…
Évidemment, la philosophie et la méthode scientifique se sont développées en Occident et A.C. Grayling n’a pas tort d’écrire ce qu’il écrit (d’autant plus qu’il s’adresse à un public occidental qui n’est intéressé que par sa propre histoire)… Mais pour un ouvrage épistémologique, qui s’interroge, entre autres, sur les limites du savoir, on pourrait s’attendre à ce que l’occidentalocentrisme soit identifié comme l’un des obstacles à la connaissance… En somme, Grayling perpétue la myopie de son milieu (la philosophie occidentale aime à se regarder le nombril et à se convaincre qu’elle est la seule à savoir penser).
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## Mercredi 06 août
Quand je m’efforce de voir les choses sous un angle différent, je m’aperçois de l’effort mental qui est nécessaire… surtout quand ça va à l’encontre de la doxa, ces opinions admises par notre société et que nous avons intégrées sans jamais les questionner.
En 2014, le photographe Phil Borges participait à une conférence TED où il s’interrogeait sur le lien entre [psychose et éveil spirituel](https://youtu.be/CFtsHf1lVI4?si=Nnfzbm7vqBGhHD33). Ayant voyagé dans de nombreuses régions du monde, il s’est aperçu que la plupart des chamanes, dans nos sociétés dites civilisées, seraient enfermés dans des hôpitaux psychiatriques ou obligés à ingérer une flopée de médicaments afin de faire disparaitre les hallucinations qui les envahissent. Il explique que dans des sociétés plus traditionnelles, ces individus sont généralement pris en charge par un chamane expérimenté qui leur apprend, souvent durant l’adolescence, à apprivoiser ces voix et autres visions, ce qui leur permet d’assumer, tôt ou tard, un rôle utile à la communauté et de mener une vie plus ou moins « normale ». Ils offrent un cadre positif à une expérience qui est jugée anormale, voire dangereuse, sous nos tropiques.
Ce changement de point de vue est un vĂ©ritable dĂ©fi pour nos esprits cartĂ©siens…Â
En Occident, considérer que quelqu’un qui entend des voix puisse ne pas être fou est une hérésie. Cette personne nous apparaît immédiatement comme un danger pour elle-même et pour les autres (même si elle n’est pas violente, n’est-ce pas ?)… Elle ne peut rien apporter à la communauté ; il faut la contenir ou la neutraliser.
Mais, quand on constate que, dans d'autres régions, ces gens-là sont traités différemment et n’en sont que plus épanouis, on est en droit de se poser quelques questions. (Questions auxquelles je n’ai personnellement aucune réponse — laissons aux intéressés eux-mêmes le soin d’y répondre.)
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## Jeudi 07 août
Je ne suis pas un *hoarder*, loin de lĂ , mais après sept annĂ©es dans cette grande maison, je constate qu’il va certainement falloir que je me dĂ©barrasse de beaucoup de choses… Un grand mĂ©nage de printemps, pour ainsi dire.Â
Si je dois jeter des habits que je ne mets jamais, mais que je garde juste au cas où, ou des ustensiles de cuisine, ou que sais-je encore, aucun problème. Mais quand je regarde ma large bibliothèque répartie dans plusieurs pièces de la maison… aïe… va aussi falloir que je la dégraisse. Horreur et damnation !
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## Vendredi 08 août
La pseudoarchĂ©ologie a de quoi fasciner car, quand elle est bien faite, elle a la mĂŞme qualitĂ© que le travail du romancier.Â
En réalité, il s’agit de la même faculté (l’imagination) mais leur rapport à la vérité et au réel diffère : le romancier n’a pas d’autre prétention que d’offrir un divertissement ; le pseudoarchéologue affirme que sa fiction est une théorie scientifique sérieuse, voire la vérité vraie.
On appelle aussi cette « discipline » : « archĂ©omanie » ou « cryptoarchĂ©ologie » — le premier terme soulignant la folie obsessionnelle de l’amateurice et le second insinuant que les preuves archĂ©ologiques ont un sens cachĂ© et que seuls les initiĂ©s (\#NousSachons) peuvent le rĂ©vĂ©ler.Â
Elle rallie autour d'elle les conspirationnistes de tous bords, souvent des hommes, vous noterez, qui, incapables de lire des romans sans éprouver de la honte, ont besoin que leur imagination fantasque revête les oripeaux de la science (on peut établir ici un parallèle avec ces lecteurs qui dénigrent la Fantasy car elle ne serait qu'imagination folle mais qui louent la SF pour sa noblesse spéculative et scientifique — lolz).
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## Samedi 09 août
Je me verrais bien écrire un roman sur une ancienne civilisation, située durant la période du [Dryas récent](https://fr.wikipedia.org/wiki/Dryas_récent), par exemple, où le niveau des océans était entre 80 et 40 mètres en dessous du niveau actuel. Elle serait évidemment inspirée de l’Atlantide, mais je ne crois pas que j’aimerais parler du cataclysme qui l’a détruite. C’est vrai que Platon nous fournit toute la matière nécessaire à un récit apocalyptique, mais, si on aime ce genre, pas besoin de se projeter dans un passé lointain, il suffit d’ouvrir le journal et d’imaginer notre monde après 2050...
Non. J'aimerais dépeindre un âge d’or, à la manière de Thomas Burnett Swan — une société, dont les avancées seraient tout autant technologiques que spirituelles, vivant en harmonie avec la nature (hippie 2.0)… Je m’inspirerais de la sagesse égyptienne et de celle d'autres civilisations de la même époque (ou plus tardives). L’excuse parfaite pour aller dépoussiérer mes connaissances historiques et me plonger dans les dernières publications universitaires… Mais libéré de l'obligation de m’en tenir aux faits (puisque ce ne serait pas un récit historique), je pourrais prendre ce qui me plaît et ignorer le reste.
Si je voulais aller encore plus loin dans le temps, mon histoire pourrait même être une réponse queer et woke à *La nuit des temps* (1968), le célèbre roman de Barjavel qui a très mal vieilli (trop de racisme, trop de misogynie).
H. P. Lovecraft, Robert E. Howard, Clark Ashton Smith et compagnie voyaient dans le passé lointain un cadre propice à des histoires de SFFF… À mes yeux, les progrès de l’archéologie dans la seconde moitié du 20e siècle avaient rendu cette tradition désuète. Mais les hurluberlus archéomanes de YouTube (et d’ailleurs) m’ont convaincu (haha !) que cette tradition avait encore de l’intérêt (poétique plutôt que scientifique) !
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## Dimanche 10 août
Damn. Voilà que pensant aux Atlantes, et par association à feue Anne Rice, j'ai maintenant envie de lire son *Prince Lestat and the Realms of Atlantis*, presque une décennie après sa publication (ce roman est sorti en 2016 ; le temps passe vite).
Comme quoi, tout vient Ă point Ă qui sait attendre, mĂŞme les envies de lecture...
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